Ce texte a été publié dans le Bulletin municipal de janvier 2025.

Depuis les temps les plus reculés, nos ancêtres ont eu la nécessité de nommer les lieux où ils habitaient pour leurs déplacements, leurs échanges… 
 Les dénominations qui ont précédé les plans d’adressage et les coordonnées GPS se sont formées depuis l’origine des peuplements et les spécialistes retrouvent des traces de noms gaulois, romains, wisigothiques, latins et bien sûr occitans. Ces noms ont évolués, ont été déformés par exemple lors de l’établissement du cadastre au XIXe siècle, ont été francisés sur les registres d’état civil et beaucoup ont disparu.

Comme la généalogie, la toponymie est une longue recherche sur les textes anciens, sur les registres paroissiaux et d’état civil, dans les archives notariales, sur le cadastre napoléonien et aussi dans les écrits d’historiens comme l’abbé Lespine et le vicomte de Gourgues.

Au 19e siècle à Neuvic l’habitat était très dispersé. D’après le recensement de 1851, parmi les 2257 habitants de la commune, le bourg n’en comptait que 406. Les autres se répartissaient entre 57 hameaux formés par quelques habitations autour d’une ou plusieurs fermes. Ainsi, en 1850 il n’existait aucune construction entre l’emplacement de la mairie actuelle et le hameau de Théorat ni entre la rue du Dr Léger et le Terme. A partir des années 1960, l’urbanisation a progressivement relié les villages isolés pour constituer des rues dont la dénomination vient masquer le nom des hameaux traversés. 

On peut essayer de classer les toponymes en fonction de leur origine : particularité géographique ou géologique, culture pratiquée, noms de personnes…Voici quelques exemples dans lesquels on précisera les dates où le toponyme est attesté et des variantes orthographiques nombreuses dans les documents anciens.

La Jaubertie : le suffixe « ie » indique l’appartenance, c’est le domaine d’un certain Jaubert (le mainement de la Jaubertie est attesté en 1373), même explication pour la Robertie (Robert est un nom d’origine germanique, décliné en latin sous la forme Robertus).

Champroueix : forme dialectale issue du latin désignant un « champ rouge ». Les variantes sont nombreuses : Champrouy 1652, Champs roux 1674, Champrouil 1755.

Villeverneix : le premier élément Ville, du latin villa, désignait un domaine rural à partir du IVe siècle. Le second élément, verneix, est un dérivé du nom occitan de l’aulne, vern, d’origine celtique. Parmi les variantes : Villeverneuil sur le cadastre napoléonien et les cartes d’état major ou Vilavernes (1490).

Boisset : occitan, lieu couvert de buis. Issu du nom latin du buis, buxus. (1373).

Le Terme : du latin terminus « frontière, borne-limite ».  Propriété à l’extrémité d’un chemin.

Les Bertrands, Les Léonardoux, Les Jeandilloux, Les Jeannetoux: formations de l’époque dialectale. L’article Les,suivi d’un nom de personne désigne « la maison, les biens de untel ». Les formes en -oux sont des diminutifs assez spécifiques à la région.

Le Maine Dauriac : Le Maine désigne une petite propriété. C’est un toponyme fréquent en Périgord et dans les Charentes souvent suivi d’un adjectif ou d’un nom de propriétaire. La famille Dauriac (nom d’origine gallo-romaine) habitait la partie ancienne de notre maison durant les XVIe et XVIIe siècles. Le hameau du Maine Puyastier est aujourd’hui disparu mais la famille Puyastier a habité ce village jusqu’au siècle dernier.

La Chenevière : désignait un champ de chanvre. D’après les états de section du plan cadastral napoléonien la plupart des fermes avaient une parcelle dédiée à cette culture (variante Chenevrière).

Théorat est un toponyme mystérieux qui ne semble présent nulle part ailleurs qu’à Neuvic. Teurat est signalé dans un acte de 1099 et on trouve plus tard de nombreuses variantes en particulier sur les registres paroissiaux, ce nom original posant problème aux curés qui rédigeaient les actes : Teurac 1651, Touyrat 1671, Teura 1676, Tiourat 1726 (transcription phonétique de l’occitan).
 Il pourrait s’agir de l’aboutissement d’un nom de personne gallo-roman Tauriacum, ancien propriétaire d’un domaine agricole. Alexis de Gourgues mentionne en effet une forme Théora sous l’entrée La Deura (Pheodum de lo Deura, 1471), ancien fief qui pourrait correspondre selon lui au plus récent Théorat (Merci à Chantal Tanet pour sa contribution savante). 

L’étude toponymique peut s’étendre aux micro-toponymes, c’est-à-dire aux noms attribués aux parcelles avant l’existence du plan cadastral. Sur les actes notariés de l’Ancien Régime, les parcelles étaient désignées par un nom et par l’indication des riverains, d’où une grande quantité d’appellations souvent pittoresques et oubliées pour la plupart. Une recherche est en cours, elle sera sans doute publiée sur Internet.