1914 : Neuvic avant la guerre
La commémoration du centenaire de la guerre de 1914-1918 sera marquée par la publication de nombreux articles, livres, ou sites. Le modeste travail que vous consultez veut essayer de présenter les parcours des soldats neuvicois, en particulier de ceux qui sont "morts pour la France" dans cette guerre qui fit plusieurs millions de victimes.
Les sources principales sont :
- le site "Mémoire des hommes" où figurent les fiches individuelles des soldats tués sur le champ de bataille ou décédés des suites de blessures ou maladies, mais aussi les historiques régimentaires et les journaux de marche des unités;
- les registres de décès de la commune où l'on trouve les transcriptions des actes de décès, souvent après un long délai et après un jugement du tribunal pour les disparus;
- la liste des noms gravés sur le monument aux morts;
- le livre d'or des morts de la commune de Neuvic (lien aux archives nationales)
- l'article de JJ Elias dans le bulletin municipal de 2010;
- les archives départementales (fiches matricules et recensement 1901);
- divers sites sur Internet;
Le village en 1914
Neuvic est un bourg essentiellement rural, même si deux petites usines de chaussures et chaussons sont en activité (Sté Marbot et Laporte frères). Malgré ce début d'industrialisation, l'exode rural est net puisque la commune a perdu 200 habitants entre les recensements de 1906 et de 1911, passant de 2230 habitants à 2029.
Les pertes de la guerre et le déficit des naissances fera tomber cette population à 1888 au recensement de 1921 et il faudra attendre 1946 pour repasser le seuil des 2200 habitants.
Cette population est très dispersée sur le territoire de la commune, le bourg autour de l'église, de la nouvelle mairie et des écoles ne regroupe qu'un nombre restreint de neuvicois : par exemple sur les 51 décès enregistrés en 1913 on ne trouve que 5 habitants du bourg et au sein du conseil municipal, deux conseillers sur seize y résident.
Le Conseil municipal en 1914
Les élections des 5 et 12 mai 1912 ont démontré une grande stabilité, onze conseillers sortants (cs) ont été réélus, les cinq nouveaux sont plus jeunes et seront d'ailleurs les seuls conseillers mobilisés pendant la guerre. Le maire sortant, Eugène Gallais, ancien agent-voyer habitant de Gimel, est réélu au premier tour avec 11 voix sur 14. Il avait été élu maire en 1905 après le décès de Félix Justin Gaussen et il restera en fonction jusqu'en 1918. L'adjoint est Paul Texier.
Année de naissance |
Domicile |
Age en 1912 |
Remarques |
||
Gallais Eugène |
retraité |
1845 |
Gimel |
67 |
cs |
Gaussen Georges |
Propriétaire |
1886 |
Linceuil |
26 |
mobilisé |
Texier Paul |
sans prof. |
1846 |
Le bourg |
66 |
cs |
Dubos Louis |
Instituteur |
1858 |
Sourzac |
54 |
cs |
Lajarthe Jules |
Agriculteur |
1858 |
Villeverneix |
54 |
cs |
Leymonie Albéric |
« |
1873 |
La Jaubertie |
39 |
mobilisé |
Maze Camille |
« |
|
Planèze |
|
mobilisé |
Mazeau Lucien |
Capitaine retraité |
1843 |
Planèze |
69 |
Cs, décédé nov 1912 |
Lacombe Jean |
Agriculteur |
1866 |
Théorat |
46 |
cs |
Allard François |
« |
1878 |
La Cote |
34 |
mobilisé |
Mazeau Jean |
« |
1854 |
Les Jeandilloux |
58 |
cs |
Valentin Charles |
Commerçant |
|
Le bourg |
|
mobilisé |
Chevalier Adrien |
Agriculteur |
1864 |
Les Jeannetoux |
48 |
cs |
Décoly Jean |
« |
1851 |
Les Léonardoux |
61 |
cs |
Laporte Grégoire |
« |
1859 |
Les Cinq Ponts |
53 |
cs |
Fraisse Sylvain |
« |
1847 |
Haute Robertie |
65 |
cs |
Après des réalisations importantes et lourdes pour les finances communales : école de filles (1890), école de garçons (1896), mairie (1902), l'heure est plutôt aux remboursements d'emprunts et les projets sont modestes.
En 1908, un transformateur électrique est implanté derrière la mairie, les premiers lampadaires éclairent les places publiques. La même année, la flèche du clocher s'incline dangereusement après un coup de vent, des réparations urgentes sont réalisées.
En 1913, l'ancienne mairie est transformée en hôtel des postes (c'est actuellement la boulangerie Lominé) et une halle est construite sur la place de la bascule.
En février 1914, les vétérans des armées souhaitent édifier au cimetière un monument aux morts de 1870, une concession de deux mètres carrés est accordée gratuitement.
Les puits, fontaines, pompes demandent des réparations, un emprunt sera nécessaire pour réaliser les travaux en 1913 et 1914.
Des soucis pour la gestion de l'hospice
Le legs de Jean Pouget (1874) avait permis la construction de l'hospice qui fut ouvert en 1887 après le règlement judiciaire des contestations des neveux de J. Pouget. Une convention avec l'ordre du Sacré Coeur de Jésus de Privas assure le fonctionnement grâce à deux religieuses. Mais en août 1913 ces religieuses quittent Neuvic pour raisons de santé et l'hospice ne peut plus fonctionner. En mars 1914, les héritiers Pouget en profitent pour mettre la commune en demeure de remettre l'hospice en activité, condition imposée par le legs ! Une solution doit être trouvée rapidement. C'est la Congrégation Sainte Marthe de Périgueux qui prend le relais, deux religieuses assurent les soins. Cet hospice sera sollicité dès le mois de septembre pour accueillir des blessés en convalescence.
Les obligations militaires
Les hommes reconnus valides par le conseil de révision devaient s'acquitter de leurs obligations militaires et selon leur âge, ils passaient par trois armées différentes : l’armée d’active, l’armée de réserve et l’armée territoriale.
En 1914, la situation était la suivante :
- Armée d’active (durée 3ans) : Soldats âgés de 21 à 23 ans nés en 1891, 1892, 1893.
- Armée de réserve (durée 11ans) : Soldats âgés de 24 à 33 ans nés entre 1881 à 1890.
- Armée territoriale (durée 7 ans) : Soldats âgés de 34 à 39 ans nés entre 1875 et 1880.
- Réserve de l’armée territoriale (durée 7 ans) Soldats âgés de 40 à 45 ans nés entre 1868 et 1874.
Les neuvicois étaient le plus souvent affectés aux régiments cantonnés dans la région :
- 50e RI (régiment d'infanterie) à Périgueux (caserne Bugeaud)
- 108e RI à Bergerac
- 107e RI à Angoulême
- 63e RI à Limoges
- 78e RI à Guéret
- 100e RI à Tulle
Les régiments de réserve portaient un numéro au delà de 200 : le 250e était la réserve du 50e.
Chaque régiment comprenait trois bataillons et son effectif était d'environ 3000 hommes dont une soixantaine d'officiers et 150 sous-officiers.
La mobilisation
Le 28 juin 1914 est l'étincelle qui met le feu aux poudres dans une Europe puissante mais divisée. Pendant le mois qui sépare l'assassinat de l'héritier du trône d'Autriche-Hongrie et l'embrasement généralisé de l'Europe, la diplomatie des différents Etats s'active : ultimatum, discussions, menaces, soutiens... Une tension diplomatique qui trouve son aboutissement dans les différents ordres de mobilisation fin juillet début août. Ces ordres de mobilisation sont la dernière étape avant la guerre mais ils marquent une étape, tout retour en arrière pour des discussions paraissant déshonorants pour les chefs militaires.
De nombreux sites relatent les évènements de juillet 1914. On pourra en particulier consulter celui de A. Carobbi
Dès le 26 juillet les officiers sont rappelés. Le 30 juillet, les troupes près de la frontière sont mises en état d'alerte.
L'historique du 50e RI (publié en 1920 à Périgueux - Imprimerie Cassard) donne une version "officielle" de l'ambiance à la caserne Bugeaud :
L'ordre de mobilisation est daté du 2 août, des affiches immenses sont placardées dans toutes les communes.
Même si la guerre n'est pas encore déclarée, l'engrenage fatal vers une guerre que l'on croit courte est enclenché.
Plus de huit millions de français seront mobilisés et parmi eux on dénombrera 1 400 000 tués (soit 10% de la population active masculine) et 4 000 000 de blessés. Le bilan de cette hécatombe est ahurissant ...
Les articles suivants donneront quelques éléments pour suivre les parcours de soldats neuvicois et en particulier des morts dont le nom est gravé sur le monument de notre commune.
Article suivant : les premiers mois de guerre.